Le chant des noyés, scénario pour Les Ombres d’Esteren

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Voici l’un des scénarios (canevas) dont je me suis servi dans le cadre de ma campagne des Ombres d’Esteren. L’idée était de donner de la vie à la communauté dans laquelle arrivaient mes PJ, j’y ai donc plantés plusieurs débuts de scénarios ne les concernant pas, mais avec lesquels ils pouvaient se positionner. Ils peuvent aussi bien être utilisés séparément.

ombres d'esteren scenario jdr
Miranda, par John William Waterhouse.

Pour télécharger le scénario en .pdf c’est ici.

Le scénario en peu de mots

Après le naufrage d’un bateau de pêcheurs, les familles éplorées sacrifient des offrandes à la mer et s’en retournent vers les cultes. Seule Cetern Donnghail ne se remet pas de la perte de son fiancé Gawaen Melchi. Elle va tout faire pour le retrouver, ils devaient se marier au printemps. Elle ira jusqu’à recourir à la magie noire en passant par les services d’une morcail bannie dans les bois, ce qui va vite s’avérer dangereux. Le village fait mine de ne rien voir, personne ne veut reconnaître l’impuissance des traditions à aider la jeune femme, et la vérité est trop dure à assumer.

Le chant des noyés est une histoire d’amour tragique, de lâcheté et de magie noire.

Durée : 4 ou 5 heures si joué d’une traite.
Style : Ambiance, mystère, épouvante, dilemme moral.
Cadre : Bord de mer, par exemple Llewellen (Salann-Tir).
Saison : Indifférente.

Enjeux & recompense : Sauver Cetern, assumer une place dans la vie spirituelle et sociale de la communauté.

Rôle des personnages : A minima, les personnages vont assister aux efforts de Cetern pour faire revenir Gawaen. Le dramatique de la situation peut les pousser à agir pour l’aider, lui apporter un soutien religieux ou psychologique… et jusqu’à l’empêcher de faire réellement une bêtise dangereuse. Des personnages versés dans les arts occultes pourront éventuellement lui proposer leurs services. En guise d’accroche plus traditionnelle (au cas où) Cetern volera du bétail pour accomplir son sortilège, et les PJ peuvent entrer dans le récit par ce biais.

Racines

Le vent se lève ce soir, les nuages noirs amoncellement dans le ciel, les pêcheurs à pieds reviennent sans tarder au village pour éviter le grain qui s’annonce. Sur la jetée, les familles des marins se pressent autour des quais pour attendre leurs fils partis en mer. On entonne des chants traditionnels et on jette à la mer de petites effigies pendant l’après-midi. A la marée, toutes les embarcations reviennent. Sauf une.

On attend longuement, toute la soirée, face aux lames qui se défoncent sur les rochers noirs. Le port est envahi, les embruns sont lourds de sel et l’obscurité s’épaissit, il fait franchement froid. Le soulagement des familles de ceux qui sont revenus éclate en rires et soupirs, mais plusieurs visages restent fermés, tendus vers le large. Le cheval des flots et ses quatre marins manquent à l’appel. Il ne reviendra pas. La vielle mère de Güstav Niebean se mure dans le silence et portera le deuil dans la misère jusqu’à la fin de ses jours. Elle tombera gravement malade et finira sa vie dans les mois qui viennent. C’est son deuxième et dernier fils à disparaître en mer. La famille entière de Llioris Daevis se soutient mutuellement, son petit frère et sa sœur sont effondrés mais la famille s’en remettra. La femme de Darek Czéski et mère de leurs enfants se retire du monde, rentre en deuil pour plusieurs années.

Cetern Donnghail n’a aucune réaction de prime abord. Elle reste sur le quais et observe l’océan pendant plusieurs jours pour attendre son fiancé, Gawaen. Sa famille (de riches propriétaires terriens) la laisse faire en faisant mine de ne rien voir alors que son futur mari « officiel » Eibhan Doughaert vient lui tenir compagnie. Les heures passent, longues, dans le silence. Cetern fixe l’horizon, jette des petits galets à l’eau, ne pleure pas. Intérieurement, ce sont tous ses rêves de pas grand-chose, tous ses rêves quoiqu’il en soit qui s’effondrent : faire sa vie avec Gawaen, le pêcheur de trois ans son aîné – plutôt qu’avec Eibhan pour lequel elle n’a aucun sentiment. Cetern est à l’âge où l’on croit encore que les mariages marchent ainsi, qu’elle aurait pu convaincre son père Harold d’épouser un petit marin sans le sou plutôt que le fils Doughaert. Derrière son air d’adolescente fragile et malléable, la jeune fille n’a aucune intention de se résigner à épouser Eibhan et à oublier son amant. Elle pense, échafaude, il doit bien y avoir un moyen de faire revenir Gawaen.

La cérémonie – On organise un enterrement symbolique des marins disparus. Pendant plusieurs heures, le démorthèn sculpte les visages des disparus dans les rochers du cairn noyé (cercle de pierres en partie recouvert à marée haute), accompagné de leurs noms. Puis de petits navires en osier, chargés d’offrandes diverses (fleurs, nourriture, bijoux…) sont laissés à la marée descendante qui les emmène au large. Le démorthèn invoque la générosité de la mer nourricière et hurle la douleur des familles éplorées. La plupart des notables du village et les familles des disparus, assistent à la cérémonie. Cris, pleurs, les émotions sont démonstratives.

Tronc

L’histoire principale de ce canevas est celle de Cetern, cherchant par tous les moyens à faire revenir son amant Gawaen. Extrêmement déterminée, la jeune femme met tout en œuvre, demande l’aide à tous et notamment, si cela se justifie (s’ils sont savants, membres de cultes, occultistes, aliénistes, peu importe), des PJ.

La famille Donnghail est un clan de propriétaires terriens bien lotis, proches des traditions démorthèn. En voyant que son état ne s’améliore pas, son père Harold demandera l’aide du démorthèn du village pour prodiguer à Cetern le soutien spirituel dont elle a besoin et l’amener à faire son deuil. Tout le monde sait qu’elle et Gawaen étaient amants, mais personne ne s’en préoccupe. Dans cette communauté traditionnelle, les sentiments personnels ont peu de place.

Le démorthèn Cilian Feagus s’acquitte de sa tâche avec sérieux, mais se raidit lorsque la jeune fille commence à se rapprocher des autres cultes. Il la rappelle aux traditions mais toute sa sagesse séculaire reste lettre morte devant la détermination de l’adolescente à faire revivre Gawaen, plutôt qu’à en faire le deuil. Ses enseignements et appels à la compréhension des cycles ancestraux restent lettre morte. D’éventuels représentants du Temple (voir feedback) ou des magientistes n’auraient guère plus de succès, puisqu’aucune de ces philosophies ne considère la résurrection physique des êtres (pour le Temple, la résurrection est spirituelle). Or, Cetern ne veut pas d’un paradis hypothétique et invisible, elle veut faire revenir Gawaen ici et maintenant, en chair et en os.

C’est Ewin Gós, le ionnthèn du village, qui va donner à Cetern ce qu’elle cherche. Ils se connaissent, ils ont le même âge et ont été élevés chez la même damathaìr, il veut l’aider. Le jeune apprenti est plus traditionaliste que son maître Cilian Feagus. Il propose donc à Cetern de recourir à des moyens obscurs plutôt que de se marier avec Eibhan Dougaerth, dont la famille est proche des préceptes du Temple. Pour Ewin, cette affaire est une lutte entre des influences spirituelles concurrentes qu’il ne s’agit pas de laisser sans réponse. Il outrepasse donc le tabou de son maître et dévoile à la jeune fille l’existence de Cliodna, la sorcière des bois, une morcail bannie du bourg (voir feedback), qui vit en ermite au fond de la forêt. Lorsqu’elle la visite, celle-ci lui adresse cet avertissement : « Si c’est ce que tu veux vraiment je peux t’enseigner comment rappeler Gawaen pour que vous soyez de nouveau réunis ; mais sache que la mort est une négociante difficile et qu’elle ne laisse personne lui fausser compagnie gratuitement.«  En d’autres termes, la semi-vie de Gawaen se paiera d’un sacrifice de vie. Cetern, confirmée dans l’idée folle que quelqu’un pouvait l’aider, accepte de se faire enseigner un rituel obscur, ancien, interdit chez les démorthèns.

Branches

Le rituel (bande sonore suggérée) A marée montante, disposer des animaux vivants au centre du cercle de « pierres noyées », haut lieu du culte démorthèn dans la région. Alors que les vagues envahissent le cairn et frappent les rochers, psalmodier un certain nombre de chants sacrés avant d’égorger les bêtes et de laisser leur sang se mêler aux flots. Ce rituel permet de faire revenir un disparu en mer dont le nom est scandé, à condition qu’un fort lien émotionnel le relie à la personne qui tente le sortilège.

Cetern s’y essaie d’abord avec des poules, volées chez son père. Ce larcin pourra éveiller le soupçon de la famille et lancer une enquête dans le village. Personne, toutefois, ne fait le rapprochement entre le voleur de poule et la jeune fille qui semble résignée et mutique depuis quelques jours. Alors qu’elle offre les volailles à la mer, elle croit apercevoir l’ombre de son amant marchant dans les flots, et entendre sa voix mugir dans le vent du large. La vision la terrifie et lui prouve en même temps que Clidona n’a pas menti. Elle attend que les choses se tassent au village, quelques jours, suite au vol de bétail. Et elle récidive.

Elle vole le plus gros bœuf de la famille d’Eibhan, c’est d’ailleurs lui qui le lui avait montré (l’animal est destiné à servir de cadeau de mariage pour sceller l’accord entre les familles). La bête vaut une fortune pour une famille de la région. En la tirant par la bride jusqu’aux pierres noyées, de l’autre côté de la plage, Cetern l’amène jusqu’au lieu de sa mort. Elle égorge le bœuf qui se débat en tirant sur sa bride alors que les vagues lui montent jusqu’au-dessus des pattes, enserrant son corps dans une gangue glaciale d’obscurité saline. L’eau noire s’empourpre du sang poisseux du bestiau alors que la silhouette congelée et ruisselante de Gawaen sort des vagues en marchant. Le jeune homme est mort, et marche pourtant ! Sa peau fripée est blanchâtre, à moitié mangée par l’humidité et les crustacés. Il est nu, la lumière de la lune réfléchit le halo blafard de sa peau dans les ténèbres de la plage au milieu de la nuit. Ses cheveux trempés tombent sur ses épaules et lui masquent en partie le visage. Cetern, fascinée et terrifiée, les mains pleines du sang de l’animal dont la carcasse tressaute sous les vagues à ses pieds, le fixe sans bouger.

Si personne ne fait rien, le noyé rejoint la jeune femme et l’embrasse cruellement. Les vagues furieuses de la marée montante les rejoignent, les entourent, et les emmènent tous les deux vers l’abîme.

Cet épisode n’a de sens que si, à un moment, les PJ en ont connaissance.

Interrompre le rituel – Qu’ils soient sur la piste des bêtes volées ou pas, les PJ peuvent se trouver là au moment fatidique. Ni Cetern ni le noyé – obnubilés l’un par l’autre – n’opposeront de vraie résistance. Si elle est interrompue, la jeune fille se contera de hurler en se débattant pour essayer de le rejoindre. Dans son cas à lui, sa présence physique peut même être discutée. Est-ce une hallucination, un mirage, un spectre ? Un jet de Résistance mentale s’impose.

Quoiqu’il en soit, Cliodna la sorcière à bien l’intention d’aider Cetern jusqu’au bout. Quitte à ce qu’elle y laisse la vie, puisque telle était sa demande – et qu’il vaut mieux laisser mourir cette jeune femme que de la faire marier avec la famille de « templistes ». Elle demande à Kaegh Donnghail, un osag brutal et sauvage qui vit plus ou moins avec elle – et qui se trouve être l’oncle de Cetern (le frère d’Harold donc, voir feedback) de veiller au bon déroulement du rituel. Il se cache dans les dunes, observe la plage. S’il avise que des tiers s’en approchent, il n’hésite pas à les tirer à l’arc depuis l’éminence de la dune, et c’est un très bon archer.

L’apprendre après coup – Si les PJ ratent le rituel, il peut être intéressant de leur rapporter après coup (c’est pour ça qu’il ne réussit pas du premier coup : il y a toutes les chances que les PJ ratent l’épisode des poules par manque d’indice, mais assistent à celui du bœuf, plus important et tragique). S’ils n’assistent à aucune des deux tentatives, on leur rapportera la disparition de Cetern. Dans ce cas, la réalité du racontar pourra être mise en doute. De même, en fonction de la personne qui le rapporte (un pêcheur à pied tardif), on pourra exagérer la mise en scène et l’assortir de divers ajouts ou omissions. Une enquête sur les lieux apportera des preuves (ou pas) de ce qui s’y est passé.

Feuilles

+ La sorcière et ses sbires – Ils sont un petit groupe d’osags (quatre ou cinq) sauvages et ultra-traditionalistes qui voient d’un mauvais œil les échanges culturels de leur communauté d’origine et les entorses à la tradition. Ils sont organisés autour de Cliodna la morcail et Kaegh le combattant déchu. Quoique les deux soient d’un certain âge, soixante et quarante-cinq ans, ils restent craints par le village qui n’ignore pas leur présence… mais n’en parle pas non plus. Ils sont les cousins gênants, un peu tabous, et cherchent à propager leur influence vers les anciennes traditions. Si les PJ sont du coin, ils connaissent leur existence ; s’ils sont étrangers ils auront plus de mal à l’apprendre.

  • En cas d’échec du rituel, si Cetern est sauvée, ils viendront jeter un mauvais œil sur la demeure Donnghail. Harold, le patriarche, père de Cetern et frère de Kaegh, essaiera de régler ça en famille mais sera vite dépassé. Leur objectif : récupérer Cetern pour lui permettre de réussir le rituel. Pour eux, un tel sort est un pacte avec les forces de l’océan, dont il n’est pas question de se soustraire au risque d’attirer de mauvaises pêches et des tempêtes à venir.
  • En cas de réussite, ils se défendront de toute accusation. En effet, ils n’ont fait qu’indiquer à la jeune fille comment faire mais c’est son désir à elle qui fut à l’origine de sa perte. Bien entendu, si un combat a eu lieu sur la plage entre Kaegh et certains joueurs au moment du rituel, la position sera plus difficile à assumer mais ces osags ne reconnaissent que la loi tribale et martiale, basée sur la victoire au combat. Quelque soient les tergiversations juridiques ou morales des PJ, s’ils ont un différend avec eux, ils le régleront en duel selon les codes de combat traditionnels.

+ La famille Doughaert – La famille Doughaert n’a pas spécialement l’intention de se mêler des affaires privées des Donnghail vues les circonstances. S’il advient que Kaegh et Harold sont en conflit, ils resteront bien à l’écart. Eibhan est un bon gars, de dix-sept ans environ, fiancé à Cetern un peu par défaut. Il n’en est pas mécontent, mais se trouve embarrassé de la disparition de Gawaen qui plonge sa fiancé dans une profonde mélancolie. Lui aussi est fiancé de force, il n’a donc pas de jalousie particulière envers Gawaen et cherche à aider un peu maladroitement.

+ Les démorthèns – L’intrusion de Cliodna dans les affaires de la communauté embarrasse Cilian Feagus (le démorthèn) qui fut son disciple autrefois. La vieille est à moitié folle, et use de son pouvoir sans discernement. Lui est plus pondéré, mais ne peut pas décemment jeter l’opprobre sur la morcail sans déclencher de violentes luttes d’influences et diviser la communauté. En effet, pour de nombreux anciens, Cliodna reste la référence en termes de croyances démorthèn et lui, malgré ses quarante ans bien tassés, un petit nouveau. Sachant que le Temple est en ville et compte plusieurs familles d’adeptes, l’heure n’est pas à la dissension. Ewin, le ionnthèn, n’a pas ces atermoiements. Il fut enseigné plus ou moins en cachette par Cliodna dont il partage le fondamentalisme. Il veut user de magie pour démontrer la supériorité des anciennes traditions, mais n’a pas la maturité de la vieillarde. Le fait que Cetern est en danger en accomplissant le sortilège lui échappe largement. Ewin est prêt à affronter son maître, qu’il juge tiède, s’il a le soutien de Cliodna.

+ Complots & non-dits – L’idée est de jouer sur l’ignorance volontaire de toute une communauté de ce qui se trame réellement. Cetern appelle à l’aide, fait le tour des cultes « officiels » et des gens qui devraient pouvoir l’aider, et c’est leur faute à eux, si elle s’en remet aux forces sinistres des morcails. Même à ce moment, personne ne fait mine de remarquer ce que la jeune fille prépare de manière plus ou moins discrète. L’idée est d’appuyer sur la lâcheté des familles, amis et du démorthèn Cilian Feagus – et sur la prise en charge de la jeune fille par Ewin et Cliodna. L’insuffisance de l’aide des adultes laissera Cetern seule pour tenter de résoudre son problème.

Au fur et à mesure de ce scénario, on découvrira les dissensions entre les différents protagonistes, des disputes entre Ewin et Cliodna, des sermons de Harold à sa fille murée dans le silence « Crois-tu que j’ai choisi d’épouser ta mère ? Crois-tu que les choses se passent comme ça ? »

Vent

Ce canevas est axé sur l’ambiance maritime dans un monde dur et sans pitié, où les adultes ne sont d’aucun secours aux amours adolescents. Dans ma propre campagne, je l’ai situé à Llewellen (duché de Salann-Tir) mais l’histoire peut aisément être déplacée ailleurs.

Dans ce canevas, la forêt (décor classique d’Esteren) est remplacée par le milieu maritime. Les croyances démorthèn s’adaptent à ce milieu en rendant grâce aux esprits de l’eau, du sel et des vents. La mer forge le décor, la culture, pourvoit en nourriture les communautés locales… c’est elle aussi qui leur arrache ses enfants sans pitié. On l’honore en lui offrant des sacrifices à la marée montante, on la craint et on la maudit en même temps. J’imagine un décor de plage normande, où les falaises abruptes alternent avec les longues langues de sable. La marée haute ou basse modifie le décor du tout au tout, on vit d’une maigre pêche, les mouettes hantent la tempête en hurlant, le vent et le goût des embruns est omniprésent. En hiver, la brutalité des éléments monte d’un gros cran. En été il ne fait jamais beau longtemps d’affilé.

Je conseille de jouer ce canevas avec une musique entêtante et planante, du pagan folk lourd et incantatoire comme Heilung ou Agalloch, en fonction des ambiances de chaque scène. Pour plus d’idées de musique, je vous renvoie à ma playlist pour Les Ombres d’Esteren.

Feedback

+ Joué linéairement, ce scénario est assez basique. Je l’utilisais en trame de fond d’une campagne plus longue, où les joueurs étaient occupés par mille sujets d’intérêt, et où chaque développement du Chant des noyés était espacé de plusieurs jours dans la vie des personnages. L’idée était alors de faire s’enchainer les événements en parallèle de la vie des PJ, qui pouvaient chercher à s’y intéresser ou pas. Ce fut assez simple puisqu’une grande partie de leur but consistait à s’enraciner dans la communauté de Llewellen, et donc à s’occuper des affaires de ses habitants.

+ Dans ma campagne, les PJ étaient membres du Temple. Pendant qu’ils rebâtissaient l’église, ils devaient apporter le soutien spirituel attendu par la population. J’utilisais donc Cetern, directement, pour les relier à l’intrigue de ce canevas. Par la suite, après l’avoir sauvée, ils devinrent amis avec elle et la relation put se développer, marquant des points dans l’esprit de la population locale en faveur du Temple.

+ Cliodna et Kaegh Donnghail étaient des PNJ centraux de ma campagne, reliés à d’autres arcs narratifs majeurs. Ils étaient donc connus de mes PJ ce qui simplifia la compréhension des liens familiaux et des relations Donnghail / Doughaert (les deux familles de propriétaires les plus riches du secteur). Si vous utilisez ce canevas comme un simple one-shot de quelques heures, je vous conseille d’en faire « la sorcière et son molosse » pour simplifier – à moins de vouloir développer les relations interpersonnages par la suite.

~ Antoine St. Epondyle

1 COMMENTAIRE

  1. merci pour l’inspi des noms !!

    I
    QU’ILS CREVENT TOUS

    Même sans ça, je serais parti… Cette cour miteuse sans éclat et sans ambition, je l’aurais quittée… Même sans ça, je serais parti ; rien n’aurait changé le cours de l’histoire… Même sans ça…
    Le Grand Blanc m’est tombé dessus… à moi putain ! Dernier fils du d’un maître de Llewellen ! Déjà pâle comme la mort, il fallait que ça me tombe dessus, comme Jenny Dent Verte… Mais moi… Moi que la nature décevante a frustré de ses attraits, moi qui ai été envoyé sur cette terre avec une peau fragile, limpide, et des yeux vénéneux, je le jure que j’en ferai quelque chose… Je ne finirai pas comme elle, à hanter les douves, victime de ces chiens, pour l’éternité ! J’en ferai quelque chose… de ce Grand Blanc…
    Quelle merde ce froid… Et cette lumière… J’en ai mal aux yeux… Mais j’ai toujours mal aux yeux… Et c’est difficile d’avancer putain… Quelles ronces de merde ! Je me suis couvert pourtant, mais cette maille glacée me brûle et mes braies sont trop fines.
    Je vais devoir passer par le guet aux sapins, je me refuse à croiser les hommes de Brayan… Pour recevoir encore des pierres et manger la poussière… Qu’ils crèvent ces chiens. Encore quelques minutes et j’y suis, les arbres commencent à changer. Plus je m’enfonce dans la forêt et plus je suis ébloui… Ce n’est pas normal putain ! Quelle merde… J’espère que je ne tomberai pas sur des Outlaws, quelles sales races ces types, toujours à quémander au village… Et dès que t’as le dos tourné… Rats !… Enfin mieux vaut encore croiser ces types que de rencontrer les Autres… Allez bordel, avance !
    Putain Mère… Vous les avez laissés… Brayan, Fergus, et Gael et Goulven… Putain de jumeaux de merde… Toujours à se foutre de ma gueule… Fergus… Qui ne dit rien comme d’habitude… Et Brayan, avec sa grosse gueule… Lui je le saigne ce porc… Et Père… Tous des putains de lâche… Je serais parti de toute façon, même sans ça…
    Quand ça a commencé je devais avoir quoi… Sept ans ? J’étais au lit, Fergus dormait au-dessus, et la flamme de la bougie posée sur son écritoire, s’est d’un coup agitée, comme si on avait ouvert les fenêtres… Dame Malorie qui somnolait sur sa chaise, en a été surprise, et s’en est approchée… Et comme elle s’en approchait, elle a d’un coup glissé, et a fait tomber le bougeoir sur ses voilages, qui ont pris feu comme la pucelle de Tilliarch ! Mais d’un coup, en un claquement d’œil, et comme je l’avais pensé, le bougeoir était de retour sur l’écritoire, scintillait timidement, et Dame Malorie, saine et sauve au sol, encore effrayée, tapait de toutes ses forces sur ses jupes indemnes…
    Et elle m’a vu cette saleté, elle m’a vu la regarder avec mes yeux transparents, sous les draps du baldaquin… Elle, que j’avais sauvée des flammes, est allée trouver le démorthen Agus, qui en a surement référé à Père aussitôt… Car dès l’aube, je me suis retrouvé interrogé par le Conseil des Cinq, seul, en chemise de lit et debout sur un tabouret, à essayer de comprendre leur conversation furieuse. Père ne disait rien… il me scrutait, la lèvre rose et tremblante.
    Depuis lors j’ai dormi seul sous les cuisines entre le cabinet d’Agus et la chambre de Dame Malorie, qui, terrifiée, ne m’adressera plus jamais la parole…
    Aïe !!! Putain de branche… Calme-toi Iain… souviens-toi « même sans ça »… Ils auraient de toute façon trouvé un moyen… Mes cheveux blancs et ma peur du soleil les achevaient de toute façon de jour en jour… Mais ce jour… Tout à l’heure… Aux cairns, pendant ce cirque d’intronisation des jumeaux… Quand les mouettes se sont toutes tues, et que la chèvre égorgée s’est relevée pour aller paître… s’en était trop…
    Tu me manques grand-mère Gill, toi les fleurs rougeoyantes en hiver et les moineaux revenus d’entre les morts ne t’avaient jamais dérangée… Comment as-tu pu donner vie à ce peureux d’Herold MacDonnghail, et comment puis-je être son fils… Ils m’ont mis dehors comme un chien, mais ils verront un jour… Encore me faut-il trouver Tuath et son monastère…
    Qu’est ce que c’était que ça ?!? Ah derrière moi du bruit entre les arbres !…

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