Le jeu de rôle est mort !

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Oh no!!, par ~savtheplanet01

Cette fois c’est sûr, le jeu de rôles (JdR) est mort. Voilà bien l’une des légendes urbaines les plus tenaces du petit monde des rôlistes. Pourtant, si l’idée de voir sombrer ce loisir unique dans les abîmes des jeux d’antan a de quoi effrayer, je pense que sa disparition n’est pas du tout à l’ordre du jour. Non, le JdR n’est pas mort. Et bien qu’il puisse être en difficulté, je prédis qu’il ne risque finalement pas grand-chose par les temps qui courent. Et ce pour plusieurs raisons.

La plupart du temps, les hauts-cris poussés par les fossoyeurs du JdR s’appuient sur plusieurs points : l’immense difficulté pour les nouveaux jeux de 1/ se faire publier et 2/ devenir économiquement viables, le déclin de la presse spécialisée et des boutiques dédiées ainsi que la chute globale de la plupart des indicateurs économiques classiques. Effectivement, dressé comme ça le tableau à de quoi faire frémir.

Oui c’est vrai, les auteurs de jeux connaissent des difficultés innommables pour faire éditer leurs créations. Et lorsqu’ils y arrivent, le succès commercial à des chances d’être aussi confidentiel que fugitif. Prenons l’exemple de COPS : bien qu’extrêmement fouillée et professionnelle, la gamme de vingt-et-un suppléments n’aura été éditée qu’une fois par Asmodée avant de connaître un bref reboot des éditions Oriflam. Énormément de travail des auteurs, qui n’aura été sanctionné -au mieux- que par un précaire équilibre recette/dépenses. Et ce même avec de bonnes critiques de la part des joueurs.

Globalement, le constat est là. Mis à part les très grands noms du secteur, tous américains et tous réédités plusieurs fois avec une flopée de suppléments, tous les jeux stagnent au mieux à un niveau de semi-notoriété. Oh bien entendu les rôlistes connaissent le nom de dizaines de jeux. Mais concrètement, en dehors de Donjons & Dragons, Le Monde des Ténèbres et L’Appel de Cthulhu, la plupart des jeux peinent à se faire un nom, et plus encore à conquérir de nouveaux joueurs. Une exception toutefois : Les Ombres d’Esteren semblent en train de tirer leur épingle du panier de crabes, largement grâce à l’huile de coude de l’association ForgeSonges et à une utilisation intelligente du crowdfunding. Au point que le jeu a été traduit en anglais et serait en passe de s’attaquer aux Amériques. Ceci étant, qui dit « association » laisse comprendre que les auteurs ne se rémunèrent pas. La rentabilité attendra donc.

Pour comprendre cette situation économique, je vous invite à changer de point-de-vue et à regarder les choses depuis les yeux des joueurs, c’est à dire des clients. Si je prends l’exemple de ma ludothèque, je peux y trouver les trois livres de base et l’écran de Donjons & Dragons 3.5, le livre de base, deux suppléments et l’écran de COPS, deux livres et l’écran de L’Appel de Cthulhu 6, ainsi que deux livres et l’écran des Ombres d’Esteren. Soit un total de dix livres et cinq écrans. Plus une fournée de dés en tous genre. Plaçons le prix d’un livre aux alentours de 30€, celui d’un écran dans les 10€ et la somme des dés pour un total de 20€ et nous obtenons la somme de 370€ environ dépensés pour le JdR. Sauf que voilà : je joue depuis une dizaine d’années avec cette ludothèque complétée de matériel récupéré sur Internet (scénarios et aides de jeux), de quelques crayons et de pas mal d’imagination. Au total j’ai joué avec une trentaine de joueurs différents, certains ont acheté des livres à leur tour, mais la plupart se contentent de jouer sans dépenser plus que le prix des pizzas. Ce qui signifie que ma pratique du JdR et celle de mes joueurs habituels nous a coûté depuis dix ans, la bagatelle de 37€ par an environ à nous tous.

C’est le problème fondamental de « l’industrie » du JdR, et paradoxalement aussi un vrai argument pour convaincre de nouveaux joueurs : le JdR ne coûte pas cher. Ou plutôt un livre coûte assez cher en soi, mais permet des parties virtuellement infinies. Tant que vous ne renversez pas le coca sur votre bouquin de règles, vous n’aurez aucune raison de le changer. D’autant que contrairement aux jeux vidéo par exemple (ô combien plus onéreux), un livre de JdR restera toujours jouable sans souffrir de dépassement technique ou d’incompatibilité. En tant que joueur de D&D 3.5, je n’ai aucune raison de passer à la version 4 si je ne le souhaite pas. Et rien ne m’empêchera de continuer à jouer avec le même jeu dans trente ans.

Le JdR encourage la création de la part de ses joueurs. Détournez les règles, créez votre univers, écrivez vos scénarios, créez vos personnages ! Plus vous créerez et moins vous aurez besoin d’acheter. C’est pourquoi on se retrouve aujourd’hui avec presque autant de jeux que de joueurs, et donc une ignoble difficulté à rendre lesdits jeux économiquement viables. Dans cette situation, les jeux de moyenne portée peinent à se faire connaitre et Donjons & Dragons renforce un peu plus à chaque édition son aspect jeu de plateau en vendant des figurines en plastique et des décors quadrillés. Si ce choix de l’éditeur est contestable pour les puristes de l’interprétation, il n’en demeure pas moins parfaitement compréhensible -voire nécessaire- au niveau commercial.

Qu’il soit de niche ou pas, un marché ne fonctionne que lorsqu’une offre rencontre une demande. Si on prend l’exemple des cartes Magic the Gathering ou du jeu de plateau Warhammer, on constate que tous les joueurs doivent passer par la case « achat » avant d’espérer faire la moindre partie. C’est justement le point sur lequel ces jeux sont critiqués : ils coûtent extrêmement cher à qui espère acquérir un niveau convenable. Ce n’est pas le cas avec le JdR. J’ai été frappé de voir lors de mes quelques parties en association à quel point chaque MJ du club avait plus ou moins créé son propre jeu en s’inspirant de jeux existants. Du coup, le club et sa trentaine de membres fonctionnaient presque uniquement avec des créations maison.

En plus de cette situation, Internet joue un rôle déterminant. Le web permet à tous les rôlistes de partager leurs créations, de discuter et de s’associer pour créer des choses ensemble, ou plus généralement pour venir piocher des inspirations, des scénarios et des aides de jeu sans créer de contact. Cela est bien-sûr nuisible à la presse spécialisée, comme le témoignent les difficultés de Casus Belli et de Jeu de Rôles Magazine ces dernières années. Mais le mouvement est structurel : la presse écrite va mal en général. Les tirages des gros magazines généralistes et tabloïds ne cessent de diminuer (et quand on voit le niveau, on n’est guère surpris), et même si ce mouvement est bien triste il est logique que la crise du secteur se répercute en premier sur les petits titres spécialisés les plus fragiles. Un doute ? Demandez donc aux rédactions des magazines de poésie ce qu’ils en pensent.

Il ne faut pas confondre le marché du JdR et sa pratique. Dire « le JdR est mort », c’est faire un raccourci trop facile. Le marché du JdR est une niche, en crise structurellement. A mon avis, il le sera toujours. Un loisir qui consiste à encourager les gens à imaginer par eux-même est par nature non viable économiquement. Et en même temps, ne connait-on pas le pouvoir destructeur de l’argent sur la passion ? Le charme artisanal et un peu bancal du JdR, et le fait que ses acteurs économiques -spécialement ses éditeurs- fonctionnent à la passion plus qu’à l’argent a quelque-chose de sain. Plus encore, l’absence de grosse rentabilité permet de garder à distance les gros industriels et donc la vulgarisation des jeux et la massification des joueurs qu’on connus les MMORPG avec la suppression des jeux par navigateurs au profit des grosses franchises mondiales. Le JdR demeure un loisir intelligent, qui nécessite de faire fonctionner le cerveau, plus que les jeux vidéo, plus que le sport, plus que la plupart des autres loisirs. Voir les capitaux irriguer le marché du JdR et en faire un loisir de masse, soyons honnête, ni vous ni moi ne le voulons.

Internet joue un rôle ambivalent, si d’un côté il impose une concurrence féroce -déloyale- à la presse et aux boutiques, il nous permet aussi d’échanger et de nous fédérer. Nous n’avons jamais autant communiqué sur le JdR qu’aujourd’hui. J’en veux pour preuve le franc succès remporté par la campagne de promotion Moi, rôliste ! initié par l’ami Alias. Alors oui, les sites de JdR, les blogs de rôlistes, les communautés vont et viennent, ouvrent et ferment, tombent dans l’oubli et ressuscitent. Les forums ont perdu beaucoup d’activité, mais les réseaux sociaux et la blogosphère carburent. Nous vivons en communauté un peu consanguine et probablement trop renfermée sur elle-même, mais nous avons au moins le mérite d’exister. La culture geek est de plus en plus médiatisée, la SF n’a jamais autant été à la mode au cinéma, les super-héros sont partout, la Japan Expo reçoit chaque année plus de monde (220 000 visiteurs en 2013). Parallèlement les jeux vidéo sont en train de fracturer le plafond, et les jeux de société connaissent une nouvelle jeunesse grâce à des titres conviviaux et faciles d’accès comme Time’s Up, Les Loups-Garous de Thiercelieux ou Jungle Speed.

Qu’on ne vienne pas me dire qu’il n’y a plus de place pour de nouveaux rôlistes. Si je ne suis pas un habitué des conventions, j’ai tout de même eu l’occasion d’organiser assez souvent des parties d’initiation pour débutants avec toujours un vrai succès tant le JdR ne ressemble à aucune autre activité. Alors ne nous enterrons pas nous-même. Personnellement j’ai encore soif de jeu, et je suis toujours en vie.

~ Antoine St. Epondyle

24 Commentaires

  1. eh oui, dès le départ du tout-commercial avec le jeu de rôles, c’était fichu! D’ailleurs, les prix donné à titre indicatif sont faux, un bouquin à 30 euros aujourd’hui, impossibeule, pas les grands noms en tout cas, et un écran, j’en vois plus souvent à 20 euros. C’est donc chère, trop chère face à ce qui est décrit dans ce très bon article, à savoir l’imagination en local et sans recherche de brouzouffes! Des forum comme silentdrift montraient bien qu’en plus de vouloir créer leurs propres jeux, les rôlistes tendent à évoluer, à chercher d’autres manières de jouer. Mieux encore, la génération des trentenaires à engendrée de nouvelles créatures, chétives pour le moment, mais déjà attablées du mauvais côté de l’écran, lançant les dés et crayonnant les fiches de leurs personnages!
    Non, le jeu de rôles est comme Christophe Lambert… Immortel!!!

  2. Je pense que tu cibles bien la différence fondamentale existant entre la commercialisation du loisir et ses produits dérivés et le loisir en lui-même. Si les jalons de la presse généraliste et/ou spécialisée pour mesurer l’état de santé du JdR ne concerne que les critères économiques, alors oui, comme tu le dis, le JdR ne sera jamais en bonne santé. Comme toi, je n’ai jamais eu besoin de nouveauté en terme de jeu, attendu que mon imagination est bien assez riche, développée et largement exprimée. Et si nombre de JdR hantent les étagères de mon appartement (environ 20-25 je pense), je ne joue guère qu’à 3 d’entre eux depuis ces 10 dernières années.

    Aux soucis rencontrés par la presse spécialisée (et plus particulièrement Casus), je ne me priverai pas de leur dire que ce sont des cons, car ils ont misé sur la priorité papier (numéro en numérique disponible parfois plus d’un mois après les version papier) au lieu de promouvoir le support électronique. En tout cas, et sans chercher à généraliser, c’est la seule raison pour laquelle j’ai cessé d’acheter la nouvelle formule l’année dernière car j’étais handicapé par le décalage des sorties numériques qui seules m’intéressaient (stop au massacre des arbres). Pas d’abonnement numérique seul prévu, et disponibilité du numérique trop tardive… bref, je l’ai eu mauvaise.

    Pour résumé, entièrement d’accord avec ta vision des choses. Cela étant, je suis sûr qu’il existe des formules économiquement rentables de JdR et ceux qui exploitent longtemps les parutions de contenus sont ceux qui l’effleurent le mieux.

  3. En fait, si on prend des critères objectifs comme le nombre de participants aux conventions américaines ou le nombre de kickstarter qui décolle, on se rend compte que non seulement le jeu de rôles n’est pas mort (ce que dit l’article), mais qu’il ne va pas mal non plus (ce que semble encore dire l’article), en fait le jeu de rôle se porte très bien merci – si pas mieux qu’il ne s’est jamais porté ! L’apparition de la vente de suppléments par .pdf, de podcasts/balados consacrés au JdR et de Kickstarter ont franchement changé la donne. Sans compter que Wil Wheaton présente dans son émission YouTube Tabletop le jeu de rôle « Fiasco » a des millions de spectateurs, boostant ses ventes… En fait, il faut arrêter d’être masochiste et de broyer du noir. Cela ne veut évidemment pas dire que chaque Indi Game francophone va devenir financièrement viable, mais ça c’est un autre problème.

  4. @derynnaythas > Effectivement j’avais vu les tarifs un peu optimistement. Du coup, ça renforce ce que je disais, même si finalement ça ne me dérange pas de payer 40€ un livre pour y jouer 10 ans. (Alors qu’un Call of Duty doté de cinq heures de jeu solo, ça me tue)

    @L’Ours > Tout à fait, mais le fait que les éditeurs traditionnels ont du mal à passer au numérique, c’est le cas bien en dehors du cas Casus. C’est con, parce qu’en sortant un e-zine au business model valable et avec la même qualité de contenu, ça aurait été très bon.

    @Venom > Merci de tes précisions, je me basais essentiellement sur du ressenti pour mon article. Si le JdR va bien globalement on ne peut qu’en être content.

    @Ploum > J’adhère tout à fait à ton concept de prix libre, notamment pour les blogs. Ceci étant pour le JdR je crois que tu ne places pas le problème au bon niveau. Je joue avec mes amis comme je ferai une soirée console ou une nuit billard autour d’une bière. Ca ne me viendrait pas à l’idée de leur demander de me payer pour ça.
    Par contre, les éditeurs et médias rôlistes pourraient s’inspirer de ce modèle pour fonctionner, je pense que là ça prendrait tout son sens. Malheureusement comme je disais à L’Ours ci-dessus, ils ont déja du mal à passer au numérique, alors pratiquer le prix libre… :/

    @Grimtooth > Je suis bien d’accord ; même si en fait, le JdR n’a jamais été enterré, et n’a donc pas de cercueil. :D

    Merci à tous de votre passage par ici et de vos commentaires !

  5. Billet très intéressant. C’est vrai que le business du jeu de rôle n’est guère florissant comparé à l’époque où je jouais beaucoup. C’est en fait assez difficile de se faire une idée du nombre de jeunes (ou moins jeunes) qui jouent régulièrement. A mon avis, le jeu de rôle sur table a aussi beaucoup souffert de la concurrence des jeux vidéos qui, même si certains se désignent sous le même nom, n’ont rien en commun, à part le temps qu’on y consacre…

      • Bonjour,

        Je voulais juste revenir sur les derniers commentaires concernant le jeux vidéo nuisant au JdR.

        Je pense que c’est extrêmement le cas, et je vais l’illustrer par un exemple relativement récent:

        Il y a quelques années, une boite développant des jeux vidéos, CCP, afin de développer de meilleurs scénarios, a racheté une des plus grosses boites de Jeux de Rôles, à savoir White-Wolf. Depuis lors, l’énergie de WW s’est fortement concentrée sur le développement de sa franchise phare (le monde des ténèbres, mais bon en tant que roliste, je pense que vous connaissez) en MMORPG. Depuis le rachat, la sortie des suppléments se fait plus rares, et la majeure partie des livres se font maintenant sur impression à la demande et PDF.

        Et ce n’est qu’un exemple parmi tant d’autres. Dans le cas des franchises Guild Wars, ils ont aussi embauché des scénaristes de Jeux de Rôles pour leurs histoires. Ces personnes ne font maintenant plus que ça, et ne travaillent plus sur un jeu de rôles traditionnel. Alors même si les éditeurs de MMO essaient de se rapprocher d’une « qualité » jeux de rôles, je te rejoins Epondyle sur ton dernier commentaire: cela ne procure ni le même intérêt ni le même plaisir. Les rôlistes sont les têtes de turc des autres joueurs dans un MMO (me suis fait insulter plusieurs fois pour avoir fait du RP dans les chans de discussion, et je ne suis pas le seul dans ce cas), on est limité par les règles et le canevas du monde imposé par les développeurs, et on ne peut donc laisser libre court à son imagination. De plus, lorsqu’un jeu va mal et qu’on commence à fusionner les serveurs, les rôlistes sont les premiers sacrifiés.

        Et pour conclure, je voulais juste rajouter un petit mot au commentaire de Ploum: Moi aussi, il ne me viendrait pas à l’idée de me faire payer par flattr ou autre des parties que je maitrise. Je le fais par plaisir, le fait de retrouver les copains autour d’une table et de s’amuser ensemble. (D’ailleurs, si jamais tu es curieux sur le sujet, je t’inviterai à jouer une partie un de ces 4 (et je suis sûr que ça va te plaire) ). Par contre, si je dois publier des scénarios ou un jeu que j’ai écrit, oui, là, je laisserai une contribution libre ;) Surtout qu’il existe des systèmes de règles Open Source, réutilisables à souhait et facilement adaptables.

        • Salut Greg, merci de ta contribution à la discussion (et du Flattr :)).

          Méfions nous quand même des boucs-émissaires. Jeux vidéo et de rôles ne sont pas si concurrents que ça, en termes d’inspiration ils se nourrissent l’un l’autre. Et en termes d’industrie, le JdR n’en est pas une car est fondé avant tout sur la passion, ce qui n’est plus le cas du JV.
          Le principal point d’achoppement, c’est que le JV propose du jeu clé-en-main et solitaire (même le multijoueur peut se jouer seul chez soi), alors que le JdR demande de l’investissement en temps, et de se retrouver à plusieurs pour de longues heures de jeu. C’est pour ça que le collégien d’aujourd’hui -qui ne peut pas échapper au JV- doit vraiment faire des efforts pour se mettre au JdR.

          Nous autres, les vieux, nous devons initier comme jamais. Mais je ne pense pas que nous attaquer aux industriels de l’entertainment vidéoludique soit une bonne idée, car le véritable ennemi est intérieur à nos cercles. C’est le snobisme. :)

          Merci de ton commentaire, bienvenue par ici !

          • Hello,

            Merci pour l’accueil. En fait, je ne voulais pas réellement m’attaquer à l’industrie du JV, mais juste montrer qu’elle a aussi fait du mal au JdR traditionnel par leur façon de phagocyter les entreprises du JdR. Car, je joue beaucoup aussi à des MMOS (même si au début, j’ai commencé uniquement car je pensais que je pourrais faire du RP avec des gens, mes copains rolistes habitant loin suite à un déménagement). En fait, je pense qu’il faille trouver un équilibre entre les deux. Par exemple que les grosses licences MMO, ayant un équivalent jeu sur table, puissent attirer de nouveaux joueurs vers ce dernier (comme Conan, Star Wars, le SdaO, et peut être plus tard World of Darkness Online).

            Sinon, je suis d’accord pour nous, vieux vétérans rolistes pour initier de nouvelles personnes. Je le fais assez souvent. Et j’aime bien jouer avec des débutants. Ils ont souvent des réactions un peu plus imprévisibles qu’un joueur confirmé, et ça met un peu de piment dans les parties :)

            • Je voudrais répondre à propos du commentaire sur le Jeux vidéo. Une fois n’est pas coutume je suis d’accord avec l’hôte de ces lieux et pour être tout à fait franc je dois dire en préalable que travaillant pour une grande entreprise de jeu vidéo, je suis peut être un peu partial (que voulez vous on ne mord pas la main qui vous nourrit…). Mais que ce n’est pas du tout en service commandé ni en tant que tel que je m’exprime ici. Par ailleurs, je suis moi-même roliste, ayant été initié par le maître des lieux, il y a déjà trop longtemps.

              Je pense que regretter que les scénaristes du JdR soient recrutés par les grandes firmes du Jeux vidéo n’est pas faire honneur au JdR. Ce recrutement n’est il pas justement la reconnaissance par une industrie aujourd’hui populaire et « riche » (dans la culture « geek ») qu’elle ne sait pas faire mieux que des passionnées? Plutôt que de regretter la perte de quelques scénaristes, de manière malthusienne, ne peut on pas penser que ce recrutement de scénariste finira par profiter au JdR en poussant d’autres aspirant scénaristes, effrayés peut être d’y voir un point final à leur carrière se dire qu’ils peuvent se recycler ailleurs ?

              Enfin, quant au joueur de MMO qui insultent les joueurs Roliste qui se revendiquent comme tels sur les serveurs je pense que cela tient au fait que les joueurs auxquels tu as été confronté Greg n’auraient de toute façon pas été attirés par le JdR. Ne demande pas à des joueurs d’adopter tes codes de jeu sur un support autre que le tient, sur un support différent. Enfin, quant au fait que lorsque le jeu périclites les rôlistes sont les plus touchés par les fusions de serveur, je pense que tu en fais de trop, les serveurs qui sont fusionnés sont les moins peuplés ou les moins rentables… Ce sont ces critères et non le fait que les joueurs soient rolistes ou non.

  6. Je réfléchis depuis de nombreuses années à tout cela, l’un de mes objectifs étant d’essayer de transformer l’expérience que j’ai pu acquérir par la pratique du Jeu de Rôle en activité rémunératrice.

    Le constat que tu fais est très juste : Denis Gerfaud m’avait d’ailleurs confié à l’époque qu’il avait du mal à comprendre comment déjà les gens arrivaient à vendre tant de suppléments pour les jeux de rôles. Lui sur d’autres jeux que Rêve de Dragon achetait le livre de base et ensuite basta il laissait aller son imaginaire pour créer SON monde.

    Ce n’est donc pas dans cette voie qu’un marché qui puisse permettre de vivre est viable.

    Ce n’est pas non plus dans l’écriture, une fois le livre de règles vendu, on ne doit pas espérer que la communauté achète de nouvelles versions. Comme tu l’as dit il n’y a pas d’obsolescence programmée pour le JdR. Si je devais aujourd’hui utiliser un système générique ce serait certainement celui de INS/MV 1 qui est simple et efficace.

    Les éditions luxe peuvent être une piste. C’est la voie envisagée par pas mal d’éditeurs aujourd’hui. Mais ce n’est pour moi qu’artificiel.

    Le crowdfunding est une très bonne idée, et qui mène pour moi à la Voie : l’Exclusif.

    Un marché peut se créer si on est capable de donner une expérience unique à ses joueurs, qu’ils n’auront vécu nulle part ailleurs. Et éventuellement quelque chose quipuisse les faire rebondir sur autre chose, leur amener des débouchés, pourquoi pas ?

    C’est le sens du projet que j’ai et qui mûrit doucement.

    N’oublions pas que la logique nous conduira du point A au point B, mais l’imaginaire nous conduira partout.

    • Certes, tu m’intrigues beaucoup avec ce teaser sur un projet mêlant JdR et… autre chose ! C’est assez énigmatique, et ça ouvre vers une autre question que je me pose souvent : le JdR peut-il être plus qu’un divertissement, mais le moyen de porter un message, une poésie… comme le font le cinéma et la littérature.

      Pour en revenir au sujet, je crains que l’idée de faire du JdR une activité rémunératrice ne soit une belle chimère. A part les blockbusters -et encore- nul ne peut jusqu’à présent espérer vivre convenablement de ça. Mais d’une certaine manière, peut-être la passion est-elle le prix à payer pour continuer à pratiquer le jeu ?

  7. Bonjour

    je découvre ce blog et ce billet grace à une amien je trouve cet article très bien et même si j’ai pas joué depuis 6 mois, depuis le temps que j’entendais que le jdr était mort, ça me rassure enfin qu’une personne nous démontre le contraire avec des sources à l’appui :).

    Du coup, je me suis abonné à ta page FB, je t’ai ajouté à mes cercles Google+, je te suis sur Twitter et j’ai mis le flux RSS de ton blog sur mon lecteur RSS, tiens, vu que tu es assez présent sur le net, as tu un comptes sur Framasphère ? Le serveur Diaspora (un reseau social avec du logiciel libre dedans) de Framasoft.

  8. Article intéressant !

    J’assure la direction du projet Esteren et j’en suis l’un des auteurs principaux. Assez régulièrement, nous sommes cités en exemple et pas mal de gens nous contactent pour savoir « comment on fait ». Au-delà de nos réussites, il y a une réalité. Tu évoques notre statut associatif et cela résume assez bien les choses. Pour ceux que ça intéresse, je développe notre parcours et ses étapes ici : http://ombresdesteren.blogspot.fr/2014/10/construire-et-publier-une-gamme-de-jdr.html

    Le jeu de rôle en lui-même est loin d’être mort mais il a connu un immense plongeon depuis les années 1990. Savez-vous que les premiers livre de base de Cthulhu chez Descartes se vendaient à 50.000 exemplaires ? Bon là c’est de tête hein mais je dois avoir les sources quelque part. Même avec Esteren et nos 5.000 exemplaires pour le livre 1, 10.000 si on ajoute les ventes de la version US, on est super loin. Or, pour une création française, c’est déjà un très gros score. C’est même compliqué d’imaginer faire mieux. La comparaison entre les chiffres de Casus belli de la grande époque et le novueau de BBE sont à peu près à une échelle similaire.

    Je ne sais pas si le JDR est mort mais il a prit un sale coup quand même. La légende urbaine que tu décris Saint Epondyle n’est pas donc pas, à mon sens, totalement infondée.

    • Salut Nel, c’est un plaisir de te voir passer par ici.
      (Et indépendamment des aspects économiques, j’adore votre boulot sur Esteren, du grand art. :) )

      Les chiffres des ventes parlent d’eux même, mais ils peuvent être trompeurs. Depuis les années 1990 il y à eu Internet. Ce même Internet qui nous permets d’avoir cette discussion, comme sur Cerbere.org, Tentacules.net et tous les autres blogs, sites et forums en leurs temps. Que la presse perde de son monopole en tant que source d’information n’est pas forcément très représentatif.

      Concernant les ventes d’Esteren par rapport à Cthuhu v1 je ne dis pas, c’est sans doute plus parlant. As-tu une idée de la raison de cet état de fait ?

  9. Bonjour !
    Article très intéressant, je n’ai pas eu le courage de lire tous les commentaires qui me semblent tous très pertinents.

    Je voulais apporter mon grain de sel au débat. Je pense que le monde du JDR à tout à gagner à renforcer son marketing et sa communication pour pouvoir se développer et croître vers un modèle rentable. Mais de ce que j’en ai vu, les éditeurs et les auteurs sont extrêmement frileux à se frotter à la communication, qu’ils ne pensent pas être adapté à leur média, du coup, c’est un serpent qui se mord la queue : « je pense pas être assez gros pour faire de la com, du coup mes ventes baissent, du coup je peux pas me payer de la com, etc. … ».

    Au niveau des produits, il y a largement ce qu’il faut, entre LdB et éditions collectors, mais aussi et surtout en termes de produits dérivés; dés dédiés, t-shirts et autres goodies. La, il y a tout un monde de rentabilité à chercher.

    Le JDR n’est pas mort, loin de la, en témoignent les assos florissantes, les magasins qui fonctionnent et la création qui existe toujours. Mais le JDR déprime, le JDR se renferme sur lui même. Alors qu’il devrai redresser le regard et regarder autour de lui. Je pense sincèrement qu’il y a de quoi faire. Mais je peux entendre que ça soit, d’une certaine façon, renoncer à son intégrité que de faire du merchandising, mais les rôlistes sont preneurs de ces produits (qui peuvent être de qualité et apporter un réel univers à la gamme), et je ne pense pas que ça nuise au JDr, bien au contraire.

    Voilà pour mon avis ! Des bises et continue ton blog et les débats ! On a besoin de ça =)

    • Salut gcoeymans,

      Je suis assez d’accord. D’autant qu’avec les nouveaux outils (crowdfunding, prix libre, systèmes d’abonnements…) il y aurait peut-être des choses à inventer de ce côté. Quand on voit la sous-représentation de l’édition, et BIEN PIRE de l’édition spécialisée (BD notamment) sur le net, c’est vraiment hallucinant d’indigence.

      Et puis je te rejoins sur la demande qui peut exister pour des objets collectors et à collectionner. Le risque est d’en faire un achat semi-obligatoire comme D&D avec ses figurines. C’est pas vendeur d’être contraint à l’achat, et je pense que les tentatives de crossover JdR / jeux de cartes par exemple risquent un peu de se faire haïr à cause de ça.

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