Please, remain calm,
the end has arrived
We cannot save you,
enjoy the ride— Bring Me The Horizon
Il paraît qu’il faut rester positif.
La sinistrose n’a qu’un temps. La négativité entrave le mouvement. Impuissant celui qui ne regarderait que l’avant, si beau, si brillant. Du temps jadis où l’on partageait nos mojitos sans crainte des miasmes covideux et des cataclysmes provoqués par nos pailles en plastique imputrescible. « Jusqu’ici tout va bien » répète l’optimiste sous les rires sarcastiques des foules sous anxiolytiques.
Et d’une certaine manière, il a raison dans la mesure où le monde est l’image qu’il s’en fait.
« Désespérés mais pas pessimistes » se disent Yves Citton et Jacopo Rasmi dans leur bouquin Génération Collapsonaute. Et si nous considérions les soubresauts qui agitent le monde et son pendant noosphérique comme autant de défis à relever, d’occasions de fleurir, comme y invite la positive attitude managériale ? Et si « collapse » était le nom de l’utopie à laquelle nous avons un jour rêvé ?
Utopique est celui qui croit que rien ne va changer, déclare Servigne sans doute pas mécontent de sa formule. Il faut perdre l’espoir que tout demeure alors que tout vient à changer. Et des cendres de nos jeunesses faire le deuil. Après tout, chaque génération ne craint-elle pas l’effondrement de sa vie d’avant ? Nous voici contraint(e)s d’apprendre à naviguer en eaux troubles, dixit Corinne Morel-Darleux. Masques sur la tronche et gel hydro à portée de main, le prétendu « monde d’après » ressemble furieusement à celui d’avant. En plus paranoïaque, moins convivial, plus inhumain alors que tout à chacun(e) est requalifié(e) en masse organique potentiellement corruptrice. Et les autruches de considérer avec stupeur la réalité d’un présent devenu imbitable.
Le monde appartient aux optimistes, qui voient en chaque perte une occasion d’apprendre. Sont-ils de si bonne foi qu’ils le prétendent ? Créeraient-ils une utopie exempte de tous les travers du monde, vrai jardin des origines, que les dépressifs y chercheraient l’arbre où s’y pendre.
Sans doute la bataille pour l’avenir se joue-t-elle donc dans notre capacité à y croire pour de vrai. A ma misérable échelle, dans ce petit navire-Cosmo d’indépendant valant moins qu’un autre mais plus que certains, voici peut-être le nom du combat que je cherche à mener depuis dix ans. Il n’y a jamais eu de futur, il n’y a que les lignes de fuite du présent. Il n’y a pas de futur, le futur c’est encore et toujours maintenant.
~ Antoine St. Epondyle
« […] le prétendu « monde d’après » ressemble furieusement à celui d’avant. En plus paranoïaque, moins convivial, plus inhumain […] ».
Et si, justement, il était au contraire plus paranoïaque, moins convivial, et donc PLUS humain ?
Le vieil adage dit « chassez le naturel et il revient au galop »… Si, comme s’accordent à le dire de nombreux scientifiques, l’entropie augmente, alors à quoi sert donc de vouloir à tout prix contenir et réguler notre nature animale et prédatrice ? C’est peut-être elle qui, au contraire, nous sauvera de nos désirs de contrôle et de supériorité…